C’est en bravant les éléments (fort vent de SO) que nous partîmes des hauteurs d’Ottrot, plus précisément du parking du Saegmulmaettel (littéralement : petite prairie de la scierie). Les cieux furent cependant cléments car nous échappâmes à la seule ondée sérieuse qui eut lieu durant notre déjeuner.
Forte de 31 valeureux randonneurs, notre troupe part à la découverte des gardiens du mont Ste Odile car ce secteur de 100 Ha est plutôt bien entouré : un mur dit Païen (surnommé ainsi par Léon IX) d’une longueur de 11km – 8 châteaux forts (au NO, le Kagenfels - au Nord, le Hagelschloss & le Koepfel - au NE, les 2 châteaux d’Ottrot - au SE, le Landsberg - à l’Ouest le Dreistein - au SO, le Birkenfels).
Notre chemin passe par une jolie source, la Badstube et nous mène au château du Dreistein (3 châteaux posés sur 3 rochers) dont la première construction fût le 1er château, construit en 1153, le plus proche du monastère (1 cavalier mettait 15min pour l’atteindre).
La légende raconte qu’un chien noir aux yeux de feux veille sur un coffre rempli de
pièces d’or : nous ne nous somme pas aventurés à l’intérieur à cause du chien !
Contrairement aux habitudes, ces châteaux furent construits sur un éperon en grès.
Cette roche est appelée "poudingue de Sainte-Odile". Elle est friable et comporte des inclusions d’autres roches. Alors que la majeure partie des châteaux repose sur du granite, le mont marque une frontière sur l’emploi des matériaux pour la construction castrale (an Nord le grès et au Sud le granite).
Nous voici repartis vers le Nord pour atteindre le 2ème château de la journée, le Hagelschloss (ou Waldsberg) et son arche impressionnante de 6m de haut, surnommée l’arche du Diable. Il y eut deux châteaux abritant 2 familles différentes dont il ne reste plus de traces du plus petit. On peut remarquer des pierres munies d’encoche en queue d‘aronde qui proviennent du mur païen que les constructeurs utilisèrent pour édifier les châteaux locaux. Ce fût avant sa destruction un repère de brigands menés par le chevalier ERB, le dernier propriétaire et occupant du château.
Nous voici maintenant dans l’enceinte du mont longeant le mur païen dont il reste de beaux vestiges. Ce mur avait primitivement des dimensions impressionnantes (une hauteur de 5m pour une largeur de 1,20 à 2m) et était constitué de 300 000 blocs représentant un volume de 40 000m3. Etait-ce un mur de défense ou une enceinte religieuse ? A quelle date fut-il construit ? Autant de mystères qui perdurent.
Nous voici maintenant à la porte Koeberlé, porte de type étroite (ne laissant le passage qu’à un seul homme traversant une sorte de couloir). 5 portes sont encore visibles et il y en avait certainement d’autres qui ont disparu.
Nous repartons vers le Nord pour atteindre la porte Nord ou porte de l’Elsberg qui est une porte à couloir entourée de 2 murs et qui était munie d’une double porte.
Nous prenons une partie du sentier des merveilles où trônent de belles sculptures en bois faites à la tronçonneuse par un bûcheron qui fût vice-champion du monde de la discipline en 1996.
Nous retrouvons le mur païen que nous suivons sur sa partie externe et passons devant la grotte d’Etichon, père de Ste Odile (nommé Etichon-Aldaric duc d’Alsace) pour arriver au Stollhafen, un rocher ayant la forme d’un pot sur pied.
Un passage par le rocher d’Oberkirch ne nous offrant pas le panorama attendu et quelque peu bouché nous amène via le sentier des pèlerins au Mont Ste Odile pour un déjeuner à l’abri des éléments au self.
Le massif du mont a été occupé dès le Néolithique (-5000 à -1800 AV JC). On estime son occupation à -4000 ans, occupation continue jusqu’à nos jours.
L’époque romaine semble avoir vu une activité intense dans le secteur au vu des objets
collectés (-58 à 481).
Le couvent a été fondé en 690 durant l’époque mérovingienne par Sainte Odile dans les murs du château de son père, Aldaric.
Plusieurs légendes existent autour de Ste Odile et laissez-moi vous conter la suivante :
Peu de temps après la fondation du monastère le roi d’Angleterre vient y faire visite. Il est émerveillé par l’une des moniales dont les yeux reflètent une mystérieuse présence. Il ne dit rien mais, rentré dans sa lointaine demeure, il envoie un messager et fait savoir qu’il exige cette femme pour lui. Sinon, il viendra détruire le monastère. Odile, qui ne s’était aperçue de rien, apprend que le roi l’a remarquée à cause de son regard. Aussitôt, dit la légende, elle s’arrache les yeux, et les fait porter au souverain, qui bouleversé par cet acte, se convertit immédiatement. Un ange se présente alors à Odile et lui remet cette part d’elle même.
Nous repartons vers le Sud le long du mur païen et nous arrêtons au rocher du panorama qui nous en offre une vue magnifique car le soleil est de sortie. Belle vue sur la plaine, Obernai, Ottrot & Bernardswiller. On trouve au bas du rocher le buste de Curt Mündel, 1er président du Club Vosgien qui édita le 1er guide des Vosges.
Nous passons ensuite devant 2 tombes mérovingiennes datant du VIIème siècle puis arrivons à la porte de Barr ou porte Zumstein qui est également un porte à couloir mais plus large, ce qui permettait de laisser des chariots pour les approvisionnements. Nous passons devant la grotte des druides, beau dolmen naturel (encore un lieu mystérieux où l’on peut rencontrer de drôles de créatures à la nuit tombée ...)
Nous terminons la partie Sud en passant devant le rocher du Wachstein qui par ses dimensions (haut 10m larg 3m) devait servir d’observatoire.
Nous voici arrivés au kiosque Jadelot pour un 2ème panorama avec vue sur les 2 châteaux d’Andlau, le haut Koenigsbourg au loin et le point culminant local l’Ungersberg avec ses 901m.
Jadelot (qui construisit le kiosque) était garde général des forêts d’Obernai et mit à jour une ancienne voie romaine secondaire qui partait du pied du Pupurkopf à la vallée de la Bruche. Il trouva également 500 pièces romaines dont on n’a jamais plus entendu parlé depuis la fin du 19ème. Nous avons donc gratté le sol avec nos couteaux, cuillères et fourchettes sans succès et avons continué notre chemin jusqu’au carrefour de la Bloss.
Après une halte au château de Birkenfels, plutôt bien conservé pour une ruine et d’où nous voyons le monastère, nous rejoignons notre parking de départ après une journée bien remplie.
31 participants pour 16km et 500m de dénivelé
Texte : Jean-Pierre Caille
Photos : Michèle & Jean-Pierre