Notre été, décidément capricieux, bouleverse notre éphéméride. Après un report de juillet à août, Thor menaçant le mercredi de ses traits électriques, perturbe nos marques et fait du jour de son ami Mars notre date de sortie !
Foin de ces troubles célestes, dès potron-minet, seize impatients ont repoussé leurs draps pour partir en expédition dans les lointaines contrées du nord alsacien. Saint Jean des Choux, ainsi dénommée jusqu’en 1920, nous a ouvert les bras après plus d’une heure de route.
Nous débutons notre marche, sous un soleil déjà radieux, par la visite de l’abbatiale Saint Jean Baptiste dont la nef romane du XII siècle prolonge une belle tour porche beaucoup plus récente qui ne dépare en rien l’harmonie d’ensemble de cet édifice admirable.
Le village, petit mais charmant, déroule ses venelles sous nos pas et nous ne tardons pas à gravir la première côte du jour vers un chemin en balcon. Les grimoires touristiques vantent de beaux points de vue mais la végétation luxuriante a goulument avalé les échappées vers le lointain. La fraicheur des bois compense avec bonheur ce mensonge éditorial du matin et nous atteignons rapidement un circuit archéologique qui fait la renommée des lieux.
L’oppidum celte, habitations perchées protohistoriques, constituait probablement un endroit sécurisé et excellent site d’observation des potentielles menaces transitant par cet endroit de passage.
Midi tintinnabule déjà aux beffrois alentour et nous nous arrêtons sur un promontoire offrant un splendide panorama avec, belle compensation, un banc géant. Idéal pour notre pause régénérante ensoleillée.
Energie reconstituée et sieste faite, nous repartons vers une carrière de grès du XII siècle ayant servi à l’édification du château du Warthenberg. Tout au long de cette promenade, nous croisons plusieurs rochers remarquables, le Huhnerfelsen, le Kanzelfelsen, le Spitzfelsen nous enchantent autant par leur beauté que par leur patronyme expressif dans la langue de nos voisins d’outre Rhin.
Le château du Warthenberg est lui aussi édifié sur un rocher, le Daubenschlagfelsen. Château mystérieux. Perdu dans la végétation, les traces de cet ensemble castral n’ont revu le jour qu’à la fin des années 1970 grâce à la curiosité et l’opiniâtreté d’une équipe d’archéologues.
Son possesseur probable, mentionné dans une charte de 1158, serait Hugues de Dabo, comte de Metz, de la puissante famille des Eguisheim-Dabo. Warthenberg aurait été érigé à cette époque pour assurer le contrôle des possessions et compléter le réseau de fortifications des Eguisheim-Dabo qui s’étendait du sud au nord du massif vosgien. (Notre ami Léon nous confirmera ces suppositions prochainement).
Entamant notre retour, nous sommes plusieurs fois perturbés par un grondement sourd et inquiétant. Thor ne devant se réveiller que mercredi et le ciel sans nuage ne pouvaient résoudre l’énigme…. Enigmatique certes mais sans grand danger ! Nous marchions sur le tunnel emprunté par le TGV et chaque entrée ou sortie de ce boyau d’une chenille à grande vitesse fait vibrer l’air comme un troupeau de bisons galopant dans la prairie du Far West.
Il fallait bien nous guérir de ces émotions avant de rejoindre nos pénates. Cela sera fait en découvrant la roche des fées, succédané des parois du Colorado alsacien mais surtout support rocheux du Mont Saint Michel local et de sa belle chapelle. Chapelle, évidemment remarquable, mais le point d’orgue du jour n’aura pas lieu sur les bancs de ce lieu saint mais sur ceux voisins et profanes du chalet du club vosgien où la mousse maltée voire «piconisée» a ravi nos esprits mécréants devant un paysage à couper le souffle.
Bravo à tous les participants qui ont avalé les 18 kilomètres et les 480 mètres de dénivelé sans jamais se départir de la bonne humeur.
Guide et texte : Patrick
Photos : Blanche, Philippe et Bernard